Política y Derechos Humanos
Politique et droits de la personne
Politics and Human Rights
Tlahui-Politic No. 1, I/1996 


LA RÉFORME DE LA SÉCURITÉ SOCIALE ET DE L'ASSURANCE VIEILLESSE AU MEXIQUE 

Mario Rojas Alba

Toute personne, en tant que membre de la societé, a droit à la sécurité sociale; elle est fondée à obtenir la satisfaction des droits économiques, sociaux et culturels indispensables à sa dignité et au libre développement de sa personnalité, grâce à l'effort national et à la coopération internationale, compte tenu de l'organisation et des ressources de chaque pays.
ATICLE 22
DÉCLARATION UNIVERSELLE DES DROITS DE L'HOMME

Mise en contexte

Mario Rojas. Montréal, Québec, décembre 1995. La réforme législative de l'assurance pour invalidité, vieillesse, retraite et décès, de l'Institut mexicain de sécurité sociale (version augmentée et mis à jour en janvier 1996 disponible en espagnol). Antécédents: le 5 septembre 1995, le Mouvement unificateur national des retraités et pensionnés (MUNJP), organisme corporatif qui regroupe 2,5 millions de travailleurs mexicains retraités, m'a demandé de leur fournir une étude sur les régimes de sécurité sociale, dans le domaine de la retraite et des pensions.

 J'ai fait la recherche demandée et j'ai envoyé le résultat de la première étude sur l'Assurance pour invalidité, vieillesse, retraite et décès, gérée par l'Institut mexicain de la sécurité sociale (Estudio preliminar del Seguro de Invalidez, Vejez, Cesantía y Muerte, del Instituto Mexicano del Seguro Social SIVCM-IMSS). En résumé, le contenu de l'étude remis en espagnol contenait: un regard général sur l'état actuel du SIVCM et sur les principaux problèmes qui s'y rattachent et une analyse globale de l'interaction entre le SICVM et divers éléments de la réalité économique-sociale actuelle, aussi bien au niveau national qu'en comparaison avec quelques pays développés. Voici quelques extraits des propos exposés.

 Le problème du revenu des retraités mexicains

 En 1988, plus d'un million de retraités mexicains inscrits au SIVCM recevaient chacun une pension de 85,000 pesos par mois (40 $US). La situation était encore plus critique pour les veuves, qui ne touchaient que 42,500 pesos par mois (20 $US). C'est-à-dire, dans le premier cas, 4 fois moins que le salaire minimum établi pour le centre du pays à cette époque. Dans le 2e cas, 8 fois moins.

 L'insuffisance des pensions déclencha le mécontentement et une mobilisation nationale des travailleurs retraités organisés au sein du MUNJP. De mon côté, en tant que député fédéral, secrétaire de la Commission de santé et membre de la Commission de sécurité sociale, j'avais proposé un projet de réforme à la Loi de sécurité sociale, pour que les pensions équivalent au moins au salaire minimum. Le Congrès de la République a accepté certaines des propositions et a finalement approuvé la réforme à la Loi de sécurité sociale pour augmenter les pensions afin qu'elles équivallent à 80% du salaire minimum, c'est-à-dire 100 $US par mois.

 En 1993, les pensions ont été augmentées pour devenir égales au salaire minimum, c'est-à-dire 418 nouveaux pesos par mois pour les retraités, et 351 nouveaux pesos pour les veuves (respectivement, 175 et 140 $US par mois). De 1980 à aujourd'hui, non seulement le salaire réel a souffert d'une détérioration de 65% par rapport au coût de la vie, mais la récente dévaluation du peso a accéléré le déclin du pouvoir d'achat du salaire mexicain. L'impact négatif est encore plus fort sur les revenus des retraités, pensionnés et veuves, au cours de 1995, le montant des pensions est descendu à 70 $US pour les retraités et pensionnés, à 60 $US pour les veuves.

 Le problème est déjà grave, mais risque de devenir bien plus dramatique, si on considère que sur les 92 millions d'habitants du Mexique, 46 millions ont entre 14 et 64 ans. En 1992 la population active économiquement était de 31 millions dont 10 millions d'adhérents au Système d'épargne-retraite (Sistema de Ahorro para el Retiro, SAR). La population assurée par l'IMSS atteint environ 40 millions. Les travailleurs retraités qui bénéficient du SIVCM (retraités, pensionnés, invalides et veuves) étaient de 1 million dans les années 70. Aujourd'hui, cette population est de 3 millions. Au tournant du siècle, elle sera de 5 millions, il est évident que l'État devrait adopter des mesures urgentes pour freiner la dégradation rapide des pensions et établir sans tarder un plan de maintien des progrès initiés en 1989.

 Le déficit actuel dans le SIVCM

 L'IMSS est triplement financé: ses fonds proviennent du gouvernement fédéral, des patrons et des travailleurs. Selon la loi, les ressources sont réparties en quatre types d'assurances: l'assurance-maladie et de maternité (services médicaux), l'assurance pour les risques du travail (accidents et maladies du travail), l'Assurance pour invalidité, vieillesse, retraite et décès (SIVCM), et l'assurance pour les garderies.

 Comme on peut voir dans le tableau 1, entre 1968 et 1989, les revenus du SIVCM représentaient presque le double des dépenses.

 Entre 1990 et 1994, comme on pourra le remarquer dans le tableau 2, l'excédent historique, calculé en dollars US, s'est transformé du jour au lendemain en déficit. Entre 1968 et 1991, l'administration du IMSS a enlevé l'équivalent de plus de 10,000 millions de $US du fonds du SIVCM, laissant les pensionnés d'aujourd'hui et de demain sans ressources économiques.

 Fraude et tentatives de privatiser le SIVCM

 A partir de 1988, le président mexicain Carlos Salinas de Gortari a essayé de privatiser le SIVCM de l'IMSS. Les mobilisations et la résistance du MUNJP, ainsi que l'opposition au Congrès, ont empêché Salinas de privatiser ce régime de sécurité. L'actuel président Ernesto Zedillo Ponce de Leon continue rapidement le processus de privatisation de différents services de la Sécurité sociale, y compris le SIVCM. Le MUNJP s'acharne avec urgence à arrêter le processus de privatisation, qui élimine de nombreux avantages obtenus à travers les luttes sociales de ce siècle.

 Les tentatives de privatisation du SIVCM ne sont pas seulement une manifestation de la politique néolibérale du gouvernement mexicain, qui veut se dégager de son rôle de soi-disant «État-providence». C'est aussi une tentative de faire avaler la plus grande fraude économique réalisée par le régime mexicain. En résumé, entre 1968 et 1991, le gouvernement du PRI a retiré illégalement l'équivalent de plus de 10,000 millions de $US du fonds du SIVCM, laissant les pensionnés d'aujourd'hui et de demain sans ressources économiques.

 Au lieu de restituer les fonds soutirés, le gouvernement mexicain préfère l'oubli: il considère le capital pillé «perdu». Sous prétexte de «modernisation», le gouvernement tente d'imposer un modèle social d'Etat désengagé, pour laisser les programmes de sécurité sociale aux mains de l'entreprise privée. De leur côté, les millions de travailleurs membres du MUNJP, choisissent de défendre le modèle de l'État responsable et décident de s'engager dans une bataille pour la sécurité sociale mexicaine, en lançant une campagne qui propose des alternatives réalistes.

 Trois alternatives

 Il est évident que l'État devrait adopter des mesures urgentes pour freiner la dégradation rapide des pensions, et établir sans tarder un plan de maintien des progrès initiés en 1989. Autrement, la détérioration pourrait atteindre un tel point que le niveau de vie des retraités et pensionnés ne serait plus une situation de survie, comme aujourd'hui, mais plongerait au même degré de recul que dans les années 30.

 Les retraités considèrent que le SIVCM représente un énorme pouvoir d'épargne qui, aux mains d'une bonne administration, pourrait générer un fonds capitalisable de milliers de millions de dollars US. Ceci permettrait une amélioration du niveau de vie des travailleurs retraités ainsi que l'accumulation d'un capital social pour le développement, fait reconnu par les entreprises privées qui se disputent dès aujourd'hui la possibilité d'acquérir les meilleurs contrats de sécurité collective, une fois privatisés par le régime de Zedillo.

 Le MUNJP défend en priorité le maintien et le développement de la sécurité sociale dans le sillon historique et culturel de la réalité mexicaine. Le cas échéant, l'autre option serait que les travailleurs retraités puissent choisir d'adhérer à un projet coopératif de sécurité sociale.

 L'actuel président Ernesto Zedillo Ponce de León continue le processus de privatisation de la sécurité sociale, pour la laisser aux mains de l'entreprise privée. De leur côté, les membres du MUNJP, le syndicat des travailleurs de l'Institut mexicain de la sécurité sociale et la Confédération révolutionnaire des ouvriers mexicains (CROM), ont choisi de défendre la sécurité sociale mexicaine, en lançant une campagne qui propose des alternatives réalistes.

 Projet de réforme du SIVCM-IMSS

 Si l'on tient compte des priorités établies par le MUNJP, l'étude et le projet de réforme du SIVCM se limiteraient aux aspects suivants:

 1. Réforme législative

 Le MUNJP demande une série d'initiatives législatives en défense de la justice sociale, pour promouvoir l'humanisation du système de sécurité sociale dans le respect de la dignité intégrale de la personne.

 1.1. Réforme constitutionnelle: pour élever au rang constitutionnel le droit à la retraite, ce qui impliquerait la modification de l'Article 123, alinéa A, et tout ce qui a trait à ce sujet dans la Loi Fédérale du Travail.

 1.2. Réforme de la Loi sur la sécurité sociale pour qu'aucune pension ne soit inférieure au montant du salaire minimum et pour que chaque pension corresponde proportionnellement au dernier salaire reçu avant la retraite. Les augmentations du salaire minimum seront appliquées automatiquement aux pensions.

 1.3. La Loi et le Règlement interne de la sécurité sociale devront être modifiés en fonction des nouvelles démarches de modernisation administrative, en particulier pour le calcul précis des pourcentages de financement partagés entre les trois sources de revenus; ainsi que dans le domaine de l'administration et de l'investissement des fonds.

 2. Évaluation et réforme actuarielle du SIVCM

 Dans le domaine administratif l'IMSS devra mettre à jour son fonctionnement pour répondre aux obligations de la vie moderne. Le défi, en quelques mots, est d'utiliser les systèmes administratifs les plus avancés et les plus efficaces, pour satisfaire aux besoins collectifs et individuels des assurés. Les principes fondamentaux de la modernisation administrative seraient:

 2.1. Modernisation des évaluations actuarielles, des estimés de coûts, recours à des méthodes d'avant-garde pour les projections économiques.

 2.2. Gestion optimale des actifs, établissement d'un fonds capitalisable du SIVCM, composition de l'actif, analyse prospective de l'actif/passif, politique de communication avec les assurés sur la gestion des actifs et des passifs.


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